EverWorld, tome 1, K. A. Applegate

Présentation

Il existe un monde que personne ne connaît, que personne n’imagine. Bienvenue à EverWorld, le pays d’où l’on ne revient pas…

Senna est belle, intelligente, mais différente. Inexplicablement différente. Lorsqu’elle est entraînée dans l’univers parallèle d’Everworld, ses amis, David, Christopher, Jalil et April, décident pourtant de la suivre et de partir à sa recherche. Ils pénètrent alors dans un monde de cauchemar où, pour survivre, ils doivent affronter des hordes de guerriers vikings, échapper aux sacrifices aztèques et aux griffes du légendaire dragon Nidhoggr… Un monde où les divinités mythologiques vivent sous la menace d’une créature extraterrestre toute puissante : Ka Anor, le « dévoreur de dieux ».

15.5/20

Chronicle

Vous ne pouvez pas savoir à quel point j’étais super contente de reprendre EverWorld ! De tous les bouquins de ma reading playlist de cette année, c’était celui que j’attendais le plus ! J’ai quand même pris trois semaines pour le lire car j’ai décidé d’un coup d’un seul de regarder Breaking Bad en plein milieu du livre et du coup je me suis fait toutes les saisons avant de reprendre ma lecture. Première fois que je regardais cette série, j’ai adoré ! Cela explique pourquoi j’ai pris genre trois semaines pour finir le bouquin ! Bref, j’ai lu À la Recherche de Senna y’a peut-être quinze ans même plus que ça et je n’ai pas pu oublié le souvenir incroyable qu’il avait laissé dans ma mémoire ! Je n’avais lu que ce tome-là et voici que je me retrouve avec une trilogie intégrale qui regroupe à chaque fois plusieurs tomes de la série ! Il y en a donc ici quatre pour le prix d’un ! Ça m’a fait super plaisir de savoir enfiiiiiiiiin ce qu’il se passait pour nos aventuriers après tout ce temps ! Je m’étais arrêtée chez les Aztèques, moi, je m’en souvenais assez mal, en revanche, tout le passage avec les Vikings est genre gravé dans ma mémoire d’enfance !

Avant même de commencer le livre, je connaissais déjà l’ambiance qui me rappelait beaucoup Le Monde de Narnia et d’une certaine manière, c’était bien le cas quand je me suis mis à lire. Je me souvenais plutôt bien des personnages et de leur saut inattendu dans EverWorld au début, c’était quelque chose que j’avais kiffé. En fait, j’ai adoré ce que j’étais en de (re)lire ! C’est typiquement le fantastique jeunesse dont je serais toujours fan. Encore aujourd’hui, à mon grand âge là, j’étais grave en kiff.

En plus de ça, je me suis sentie en confiance avec l’autrice dès les premières pages car j’ai bien aimé le traitement du personnage de Jalil, un ado noir dont les problématiques face au racisme ne sont pas juste purement ignorés comme on le voit souvent (toujours même) mais pris en compte et j’ai vraiment apprécié. Dans le même esprit, on peut lire un peu plus tard que nos jeunes héros, pommés dans un monde de vikings dangereux à l’oeil mauvais, se voient obligés de se faire passer pour des ménestrels s’ils ne veulent pas se faire bouffer par ces grands Nordiques belliqueux et du coup ils leur chantent la Marseillaise version norvégienne ! Les Vikings bien bagarreurs bien sanguinaires en sont plus que réjouis… Quand je dis et que je répète des milliers de fois que l’hymne français est sanglant et colonial (raciste) et mérite d’être jeté à la poubelle, eh bien je vois que l’autrice (le traducteur ??) n’en pense pas moins ! Je déteste cet hymne et il a l’air d’aller comme un gant à ces grands dadais blondinets, meurtriers et pilleurs de village à leurs heures perdus, mais gentils quand ils veulent 🙄

Heureusement que j’ai regardé les Marvel qui parlent de Thor et surtout Saint Seiya quand j’étais petite, ça me permettait d’être relativement familière à la mythologie nordique car le méchant des méchants dans ce tome intégral, c’est un dieu qui s’appelle Loki ! Y’a aussi un autre méchant des méchants mais on n’a pour l’instant rien sur lui, Ka Anor. J’ai hâte d’en savoir plus sur ce mystérieux extraterrestre dévoreur de dieux.

Toutefois, si j’étais super contente de reprendre cette grosse saga d’enfance, je voyais  bien que je commençais à être moins emballée sur la fin du tome 1. Et quand on enchaîne avec le tome 2, on peut dire que l’excitation est clairement retombée. J’ai donc découvert à ce moment-là que le narrateur est différent à chaque livre. J’ai trouvé que c’était bien pensé car chacun de nos aventuriers a une vision différente d’EverWorld. Ça permettait de voir d’autres facettes de ce monde dangereux et inconnu et ainsi faire le tour de l’histoire sans que cela finisse par trop se répéter. Malheureusement, je me rends bien vite compte que nos quatre aventuriers ne sont pas tous intéressants au même niveau. Le tome 2 avec Christopher pour narrateur est ainsi en dessous de ce qu’on avait pu lire précédemment car son problème à lui est qu’il ne fait que geindre et pleurer pour rentrer chez lui coûte que coûte. Il n’a rien d’un aventurier à la différence de David qui est juste en train de kiffer à mort ce qui lui arrive. Je reconnais tout de même que j’ai aimé le côté critique de Christopher à l’encontre de David et Senna. Cette dernière n’est pas nette du tout, on s’en rend compte d’ailleurs au fur et à mesure. Or, David est obnubilé par elle. Rajouter son côté héros et chef autoproclamé, eh bien il était temps que le reste de la team commence à faire contrepoids pour ne pas se laisser avoir par ces deux-là. Dans tous les cas, Christopher est le personnage que j’ai le moins aimé car il était à la limite du racisme avec les deux pieds dans le sexisme. Ses petites remarques, c’est un no way pour moi.

Le problème, c’est que depuis le tome 2 jusqu’au tome 3 où cette fois-ci, on retrouve April en narratrice, il y a un gros creux qui s’installe dans la lecture, surtout pour le livre d’April où l’histoire se centre sur les légendaires Chevaliers de la Table Ronde (euuuh, grosse question qui m’est passé par la tête : les Aztèques et les chevaliers d’Arthur vivent sur la même île ? Ça ne fait absolument aucun sens. Ils ne pourraient même pas cohabiter ensemble sans que les Aztèques aient cherché à les sacrifier en offrande à leur dieu) qui, en vrai, aurait pu être pas mal mais April n’était pas très captivante car au lieu de nous emporter dans l’histoire avec elle (comme l’avait fait David au début mais pour lui c’était facile car il ouvrait la série avec le tout premier tome donc en tant que lecteur, on est toujours plus curieux et emballé au départ), elle nous ennuie avec son crush sur Galaad. C’est une fille donc je peux comprendre le côté plus girly de son point de vue mais ce n’était pas très adapté à la situation. En plus de ça, elle analyse encore plus que Christopher les autres personnages et leurs motivations et pour moi, c’est un faux pas de l’autrice d’insister sur les personnalités des perso. Quand Christopher en parlait, ça passait car c’était léger mais avoir April plusieurs centaines de pages plus tard en remettre une couche en détaillant encore le côté psychologique des perso, c’était largement pas la peine. On a compris que David se prenait pour le héros du film, pas besoin d’analyse supplémentaire !

Bref, un peu chiant, quoi. C’est sans compter sur le tome 4 qui arrive en renfort avec le plutôt discret Jalil que j’ai bien aimé malgré ces toques. C’est pas vraiment lui mais c’est surtout l’intrigue qui redevient un peu plus piquante. On a juste envie de savoir ce qui se cache dans la grotte et comment ils vont se sortir de cet enfer. La lecture remontait bien sur la fin et donc pour moi, c’est un bon premier tome fantastique. J’aurais quand même voulu savoir comment ça allait se passer pour Hel, je ne sais pas si on aura la réponse au prochain volet. N’empêche, passer d’une intrigue à l’autre en oubliant totalement celle d’avant est pour moi enfantin mais c’est un peu le public, les petits vont pas se demander où en est Merlin avec Loki ou qu’a fait Hel après que nos héros se soient échappés. Dès qu’on passe à l’histoire d’après, celle d’avant est aussi vite oubliée. 

Enfin, je dirais que l’éditeur a vraiment bien fait de regrouper les tomes car ça donne un rendu plus complet et ils s’enchaînent bien l’un après l’autre. En plus les couvertures de cette trilogie sont super jolies. Je me souviens que les anciennes étaient d’une laideur infecte, heureusement qu’ils ont rectifié ça ! Ce premier intégral nous montre l’arrivée de la petite team à EverWorld et la découverte de ce nouveau monde. J’imagine qu’au second on partira à la chasse au trésors volés de Nidhoggr et ça me plairait bien d’avoir la suite. Mais la première chose que j’attends au tournant, c’est d’en savoir plus sur Senna, ses origines et ses pouvoirs, car, pour l’instant, c’est toujours le grand mystère autour d’elle !

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Les extraits que j’ai retenus

— Il va se passer quelque chose, a-t-elle déclaré en regardant le lac.
Pendant un moment, je me suis demandé si elle avait fini de parler ou non, et si j’étais censé répondre. 
— Qu’est-ce que tu veux dire ? Qu’est-ce qui va se passer ?
Elle a secoué la tête, très lentement.
— Je ne sais pas, je sais seulement qu’il va se passer quelque chose très bientôt. Quelque chose… de terrible.
J’ai frissonné. Ça ne m’arrive jamais. Je ne m’effraie pas facilement. Pourtant j’ai frissonné.
Elle s’est tournée vers moi et m’a souri.
— Parfois, je pressens ce qui va arriver. Je vois une scène dans ma tête, comme un film, et ensuite elle se produit. Et je me demande si c’est moi qui ai tout provoqué ou si j’ai eu simplement une sorte de prémonition.
J’ai haussé les épaules. J’étais désorienté, mais je voulais qu’elle reste tournée vers moi, continuer à accrocher son regard.
Ce qu’elle me disait était pour moi parfaitement obscur, mais elle semblait croire que je la comprenais.
— Oui, peut-être.
Puis, presque timidement, elle m’a posé la question qui allait me lier à elle pour toujours. 
— David, quand ça arrivera, est-ce que tu me sauveras ?
Je ne sais pas ce que j’ai pensé sur le moment. Qu’elle était folle. Mais même si elle l’était, je m’en moquais.
— Oui, Senna. Je te sauverai.
Alors elle m’a embrassé une fois, puis deux. Et chaque fois qu’elle ouvrait ses lèvres sous les miennes, je sentais s’échapper une autre partie de moi, et je m’en fichais. 

Le vent a soufflé ainsi toute la nuit. J’ai lutté contre le sommeil, qui a pourtant fini par venir. J’ai franchi la frontière et me suis retrouvé en cours d’éducation physique, au beau milieu d’un match de volley. J’aurais voulu sortir du terrain, mais je ne pouvais pas. Ça ne se fait pas, même si au fond tout le monde s’en fiche, tout le monde sauf l’éternel taré de service désireux de prouver au monde entier qu’il est un roi du ballon. 
J’ai donc terminé le match, suivi mes deux derniers cours de la journée et je suis rentré chez moi où ma mère avait préparé pour le dîner des lasagnes. Après le repas, nous avons regardé une sitcom. Ma mère se tordait. Elle m’a dit que je devrais rire aussi, alors j’ai obéi.
Tout cela n’avait aucune importance. Et si cela en avait jamais eu, ce n’était plus le cas désormais. J’étais à des milliers de kilomètres de là.
Le réel me semblait irréel. Tout ce qui était familier m’était devenu étranger. Cet univers-là n’était plus le mien. Mon monde n’avait plus rien à voir avec des professeurs condescendants, des parents hypocrites et les sempiternelles rengaines : « Tu as sorti la poubelle, David ? », « Où est le devoir que j’avais demandé, monsieur Levin? »
J’avais passé seize ans de ma vie sous les néons des galeries marchandes, dans de sombres couloirs d’école, dans des maisons trop petites. Seize ans de télévision à plein volume et de courrier électronique. Seize ans d’interdits : ne touche pas à la drogue, au sexe, au tabac. Fais pas ci, fais pas ça. Parce que sur le long chemin d’ennui que sera ta vie, sur ce chemin tracé d’avance qui te mènera du berceau à la maternelle, puis à l’école primaire, à l’université, à l’entreprise, à la maison de retraite en Floride et enfin à la tombe où tu te décomposeras lentement pour l’éternité, il me devra y avoir sur ce chemin que des pensées positives, une alimentation équilibrée et des chansons d’amour débiles.
Je savais où j’étais. J’étais à bord d’un drakkar qui partait pour la guerre. Je n’étais pas ici, assis dans un fauteuil du salon à regarder l’image en deux dimensions de gens qui se faisaient passer pour d’autres. J’étais endormi, et tout cela ne serait qu’un souvenir.

Senna est la nuit, comme April est le jour. Elle est une de ces nuits où, allongé les yeux grands ouverts dans le noir, vous sentez l’énergie qui brûle à l’intérieur de vous. Elle ne vous laisse jamais en paix. Senna est une de ces nuits où vous roulez sans but dans les rues au volant de votre voiture, l’œil à l’affût, avide de quelque chose de dangereux et d’excitant à la fois.
Senna est une magicienne qui vous promet des révélations, mais qui vous cache toujours l’essentiel. Elle est déroutante, obscur, envoûtante.
Marche le long de cette allée sombre avec moi, Christopher. Pourquoi ? Je ne te le dirais pas. Je me contenterai de ce sourire énigmatique. Et quand tu me demanderas s’il y a quelque chose à redouter, je te répondrai : « Oui, Christopher. Ce n’est pas ce que tu souhaitais ? »
Senna fréquentait mon lycée. Mais c’était un grand lycée, il y avait beaucoup de filles, et je ne l’avais pas remarquée. Pourquoi ? Sur ce point, j’ai une théorie. Je crois que je n’avais pas remarqué Senna, tout simplement parce qu’elle ne voulait pas que je le fasse. Pas tout de suite. 
Mais à cette fête au bord de la piscine, la fête d’April, Senna avait souhaité que je la voie, que je concentre toute mon attention sur elle, que ma bouche se dessèche, que mes membres prennent la consistance du coton.
C’est une fille étrange et inquiétante. Ne sous-estimez jamais la face obscure de la force.

— Elle nous ment, David, ai-je renchéri. Elle se sert de nous. Je ne sais pas comment, je le reconnais, mais c’est vrai. Elle se sert de nous en ce moment ou, en tout cas, elle a l’intention de le faire.
David essayait de garder son air en colère. Mais nous étions tous les trois contre lui. Et contre Senna. Lui qui se considérait comme notre chef, nous venions de voter sa destitution.
— Écoutez, si on veut sortir d’Everworld, il n’y a qu’elle qui puisse nous aider.
Jalil a fait la moue. 
— Ne me prends pas pour un débile, David. Tu ne veux pas quitter Everworld. Tu veux devenir Galaad, mec. Tu veux avoir un château et des mecs qui bossent pour toi. Tu veux passer ton temps à tuer des dragons, puis rentrer à la maison pour retrouver Senna dans sa petite robe de princesse médiévale, qui t’aura préparé des côtes de porc et une bonne bière. Tu me prends pour qui ? Un imbécile qui ne voit pas clair dans ton jeu ? Tu crois que je ne te connais pas ?
David a ignoré ses allusions.
— Tu détestes Senna parce qu’elle n’est pas comme toi, Jalil. Tu sais, il y a des gens qui ne t’aiment pas parce que tu es noir ou qui me détestent parce que…
— Oh, arrête ! s’est écrié Christopher. Maintenant la pauvre Senna fait partie de la minorité opprimée des sorcières ? On doit la protéger parce que c’est une sorcière ? Tu délires ou quoi ?
— Ce n’est pas que je la déteste, a repris Jalil plus calmement, c’est juste que je ne lui fais pas confiance. Et si elle ne t’avait pas mis dans sa poche, tu ne lui ferais pas confiance non plus.
— Tu sais quoi, Jalil ? Va te faire voir ! Toi aussi, Christopher. Vous n’y comprenez rien, les mecs. 
David est parti comme un fou. Retrouver Senna. Ils se sont mis à discuter, trop loin pour que je puisse les entendre, surtout que David nous tournait le dos. Senna me regardait par-dessus son épaule.
Nous avons soupiré tous les trois en même temps.
— Super. Maintenant il ne reste que nous trois, a dit Jalil. Un ami de moins, un ennemi potentiel de plus. De mieux en mieux.

— Pourquoi nous as-tu entraînés ici ? ai-je demandé sur un ton amer. 
Senna a réfléchi un moment. Puis elle a répondu :
— Ici, c’est un monde plein de dangers. Je ne savais pas grand-chose. Juste que ça allait arriver. Je ne…
Elle a secoué la tête et détourner les yeux. Mais en me laissant le temps de voir la tristesse sur son visage.
— Quoi ? l’ai-je pressée.
— Je ne voulais pas être seule, a-t-elle ajouté, pathétique. Et j’avais besoin d’un champion pour me défendre.
— David ?
— C’est tout ce que j’ai pu trouver dans l’urgence.
Ça me rendait folle la façon qu’elle avait de dire ça. Peut-être que David n’était pas vraiment Galaad, mais il risquait sa vie pour elle, pour moi. Pour le monde. 
Tout ce qu’elle avait pu trouver dans l’urgence ?
— Tu croyais que ça allait être comment ici ? l’ai-je questionnée. Je veux dire, tu avais bien une petite idée. Tu savais que c’était un coin bourré de dragons et de trolls ? Tu avais entendu parler de Loki ?
— On n’est pas amies, toi et moi, April. Ne crois pas que je vais répondre à tes questions alors que tu me détestes, OK ?
J’aurais voulu la gifler. Mais comment savoir ce qu’elle m’aurait fait en retour ?

Combattre ou fuir. La décision fondamentale que doivent prendre toutes les formes de vie consciente, à un moment ou un autre. Certaines fuient toujours. Aucune ne combat systématiquement.
Ce moment où vous décidez de décamper devant une menace est vraiment particulier. C’est là que vous vous rendez compte que vous êtes en danger. Et que ce danger est trop grand pour que vous l’affrontiez. Ou du moins que le risque est trop grand par rapport à ce que vous pouvez y gagner. 
En une fraction de seconde, vous devenez la proie. Et toutes les réactions instinctives de la proie surgissent en vous du plus profond de votre être. La peur. Pire encore, une peur vertigineuse.